#1 Changer le monde : le mien d’abord
Publié par Charlie | Commentaires :7 | 18 juin 2016Il y a très (très) longtemps que je réfléchis à cette série d’articles, que je veux l’écrire et que je recule devant l’obstacle.
Comme tous les articles importants et difficiles à écrire que j’ai publiés ici, son fantôme me bloque dans ma progression. Il faut le sortir, prendre le(s) risque(s), pour pouvoir continuer à avancer. Aujourd’hui, je me lance donc, un peu émue. Merci par avance de vos retours et de votre indulgence.
Et parce que la rédaction de ce premier volet a remué beaucoup de souvenirs, heureux ou douloureux, je le dédicace à Alexandra, Brigitte, Claire, Claire et Claire, Caroline et Carolyn, Coralie, Corinne, Élodie, Éloïse, Émilie, Isabelle, Joëlle, Lydie, Olivia, Valérie… : mon crew, mes amies, mes soeurs, mes fans de la première heure, mes encouragements et mes coups de pied au derche : MERCI.
Et aussi à Antoine, Baudouin, Charly, Guillaume, Jeff, Mathew, Olivier, Romain, Yann et Yan : les oreilles, les coups de paluches, les confrères et les prises de conscience nocturnes légèrement alcoolisées : HIGH FIVE.
Il était une fois, le changement
Pour moi, tout a vraiment commencé il y a 8 ou 9 ans. J’ai quitté le domicile de mes parents en ouvrant grand mes ailes. J’ai pu faire mes propres choix de vie, et j’ai commencé à manger bio. J’étais fauchée, j’ai meublé mon appartement avec ce que je trouvais dans la rue. J’ai arpenté les puces de Saint-Ouen. J’ai quitté H&M pour les friperies de Châtelet-les-Halles. J’ai rencontré un chasseur qui plumait un faisan et créé mon premier bijou. J’ai commencé à bricoler des trucs et des machins. J’ai rencontré des comédien(ne)s, des musiciens, et conservé mes amis ingénieurs ou informaticiens. On a discuté des nuits entières. J’ai lu, lu, lu. On a grandi, nos opinions se sont construites, nos idées se sont étayées.
Vivre à la campagne
Les années sont passées, et j’ai saisi la première opportunité qui s’est présentée à moi pour filer m’installer à la campagne, en Provence – pas folle, la guêpe ! Je réalisais ainsi un rêve : vivre dans une forêt, avoir un jardin, faire pousser des fruits et légumes, avoir deux chats… Je vous en ai déjà parlé dans cet article, et sans doute ailleurs. Là, je me suis mise au yoga, et une séparation compliquée a accéléré mon investissement dans la méditation, je vous en parlais ici (et aussi là et là).
Manger mieux
Vivre dans la nature, ça m’a immédiatement aidée à consommer local et de saison, à acheter à de petits producteurs, et à manger plus de fruits et légumes, tout simplement. On a des fermes, des élevages près de chez soi, on croise des troupeaux de moutons ou des faisans sur la route pendant la journée, des familles de sangliers la nuit. Très vite, la grande carnivore que j’étais alors a voulu lever le pied, mais le virage a vraiment eu lieu quand je me suis installée seule, dans un appartement atypique d’un petit village provençal, un an et demi après mon arrivée dans le sud. Tout de suite, pour célébrer ce nouveau départ, j’ai décidé de ne pas consommer de viande pendant un mois et demi, et de voir comment ça se passait.
Les premiers jours ont été difficiles : je ne savais pas quoi manger (je vous jure !). Alors, je me suis dit : soit je laisse tomber tout de suite, soit j’essaie vraiment. J’ai lu des articles, arpenté les magasins bio, épluché le blog d’Antigone XXI, et je me suis mise aux fourneaux. J’ai transformé mes gâteaux en gourmandises veganes, j’ai fait germer des graines, j’ai inventé plein de burgers végétariens de dingue… Je me suis amusée comme une petite folle ! et, surtout, je me suis régalée.
Au bout de deux mois, je me suis rendue compte que je ne reviendrai plus en arrière, au contraire.
Changer de métier, une fois, deux fois…
Je suis arrivée en Provence en devenant auto-entrepreneur dans l’édition beaux-livres, soutenue par Pôle Emploi. Je gardais donc mon métier parisien, celui pour lequel je me suis formée pendant 5 ans, et que j’exerçais depuis déjà 6 ans. J’avais déjà un certain ras-le-bol, une impression de plus en plus prégnante que ce que je faisais ne correspondait pas ni à mes idées ni à mes idéaux, mais j’espérais que travailler à distance me re-connecterait avec ce que j’aimais dans mon travail, et me laisserait la disponibilité de m’occuper de mon jardin et de fabriquer mes bijoux.
Au bout d’un an, on m’annonce que mes allocations vont prendre fin 3 mois plus tard, car les auto-entrepreneurs, à l’époque, n’avaient pas le droit d’être au chômage plus de 15 mois… Au même moment, mon mec me demande de quitter notre domicile, plus très sûr de ses sentiments pour moi : ambiance, ambiance !
Je trouve alors un boulot de vendeuse-assistante dans une boutique plutôt chouette de Saint-Rémy de Provence, la première fois que mes copines me rendent visite sur mon nouveau lieu de travail, elles sont stupéfaites : ce boulot est fait sur-mesure pour moi ! Tout ce que j’aime est réuni : du vintage, du créateur, des imprimés de dingue, de l’artisanat, de l’art… Mes 5 ans de Lettres modernes ne me sont pas inutiles, je sais parler du travail d’un artiste, et j’apprends rapidement le B.A.-BA du parfait vendeur. En parallèle, je continue de fabriquer mes bijoux, et de préparer mes ventes privées, le plus souvent chez Alexandra-Miss Crevette à la Roque d’Anthéron. Mes journées durent 12 à 14h, je suis à bloc.
Malheureusement, il s’avère rapidement que mon patron, au premier abord très sympathique, bienveillant quoiqu’un peu trop paternaliste et intrusif à mon goût, est plutôt du genre à se passer les nerfs sur moi. Les semaines passent et ma joie de vivre fond comme neige au soleil, j’ai de plus en plus de difficultés à me lever le matin, j’ai l’estomac noué sur le chemin du travail… Je ne sais jamais à quoi m’attendre : rigolade ou crise de nerfs, aujourd’hui ?!
Jusqu’au jour où, après une matinée à me faire hurler dessus pour un oui ou un non, je prends conscience que j’ai peur. Que sa colère déborde tellement que mon corps a un réflexe de se protéger quand il passe près de moi. Que je respire mieux quand un client entre dans la boutique, parce que, pendant quelques minutes, les cris vont cesser. Quand je sors déjeuner, je prends mon téléphone, et appelle Olivia qui était encore La Juriste. Elle écoute mes malheurs et mes larmes pendant une heure et demie, avant de me demander si je compte y retourner, car ça va être l’heure… Je ne suis pas en état, je tremble, je n’ai rien pu avaler, j’ai envie de vomir à l’idée de revivre ce cauchemar pendant encore 4 bonnes heures… Mon médecin m’arrête, et je vous passe le reste de l’histoire pour sauter aux conclusions : je suis au chômage, je suis toujours auto-entrepreneur, c’est parti je me lance pour de bon dans l’artisanat !
Créer une entreprise qui a du sens
Grâce à ce job alimentaire pas toujours drôle, j’ai pris pleinement conscience de ma démarche et sa valeur, j’ai développé ma capacité à m’exprimer à l’oral avec aisance face à des inconnus, j’ai appris la réalité du métier de commerçant. J’ai décidé en conscience d’utiliser ces atouts, de travailler sur moi, sur ma relation à l’argent, sur mon estime de moi et de mon travail, et de me donner ma chance, de me faire ce cadeau extraordinaire de me lancer à mon compte, d’essayer de vivre de ma passion et de créer mon propre métier.
Je recycle des matériaux, je valorise des “déchets”, je mets en valeur l’insensée beauté des plumes des oiseaux de chez moi, je crée des pièces uniques et développe plein de nouveaux modèles, je fabrique et je gère tout moi-même : artisan, mannequin, marchande, photographe, gestionnaire, webmaster, DA…
Heureusement, je trouve dans mes ami-e-s de précieux soutiens, des conseillers avisés, des coachs énergiques ! Car je découvre la solitude de l’entrepreneur, les galères administratives, les doutes existentiels, la fatigue et, parfois, le désespoir… Mais aussi leurs revers : la solidarité ! la joie ! le partage, l’économie circulaire, L’ÉNERGIE ! le bonheur 😉
La suite au prochain épisode, où on parlera de monnaie et de consommation locales, …
N’hésitez pas, partagez vos histoires, vos mondes qui changent, enrichissez-moi, enrichissez-nous !
lafilledelencre
20 juin 2016Je ne suis plus La Juriste mais toujours derrière toi, même de loin, pour te soutenir 🙂
Parfois, ta recherche de bien-être me fait un peu peur, je crains tout ce qui est mystique, mais je continue à te suivre, pour voir jusqu’où tu iras. Et je suis certaine que tu iras loin, aussi loin que ton coeur te porte 🙂
Charlie
21 juin 2016🙂 T’es une sacrée nana Olivia !
J’espère te montrer que la spiritualité n’est pas dangereuse ; -)
Mais c’est sûr que c’est plus “facile” pour moi qui ait eu un rapport avec ça depuis toute petite
De lauzun
20 juin 2016Encore un article digne de toi, clair, poignant, honnête et pur !!!
Merci merci et je ai hâte de te relire encore et encore
Tu as plus d’une plume à ton arc !!!
Charlie
21 juin 2016hihi ! Merci ma douce !
Zoline
20 juillet 2016Je viens de découvrir ton site grâce à l’article de Saraha sur le picnic zéro déchet de Nice, et je suis bien contente d’avoir lu cet article en premier!
ça résonne beaucoup en moi ce que tu dis!
Bravo pour ce témoignage qui fait du bien à lire, et communique une belle énergie pour aller de l’avant!
Charlie
18 août 2016Merci Zoline, voilà qui est super motivant pour continuer :))
Bonne soirée et à très bientôt 🙂